Initialement conçu à l'origine comme un court-métrage, expliquant sa très courte durée par rapport aux autres films du studio, Dumbo, l'éléphant volant a les honneurs d'une projection spéciale à la seconde édition du Festival de Cannes en 1947 où il reçoit d'ailleurs le Grand Prix International du Dessin Animé. Il sort ensuite dans un premier temps à Paris le 09 octobre 1947, puis le 25 octobre 1947 dans le reste de la France. Il ressort ensuite successivement le 19 décembre 1956, le 09 octobre 1970 et enfin le 26 mars 1980. Par la suite, il n'a plus été proposé au cinéma en France, Dumbo ayant été continuellement commercialisé en VHS car ne figurant pas dans la liste des films soumis au moratoire Disney et où il adopte son titre actuel de Dumbo tout court, bien que le générique français fasse toujours apparaître le sous-titre originel. A ce jour, le long métrage dispose de deux doublages, celui d'origine en 1947 et son redoublage de 1980.
C'est l'histoire poignante d'un éléphanteau né avec des oreilles trop grandes pour lui. Mis à l'écart et tourné en ridicule par les autres pensionnaires du cirque, il finit par se lier d'amitié avec Timothée, une souris au tempérament jovial. A force de persévérance et de courage, Dumbo parvient un jour à s'envoler... et devient la grande vedette du cirque.
Dumbo n'est pour ainsi dire pas une pièce maitresse du catalogue des longs métrages animés, car il se dégage un fort sentiment de mélancolie tout au long du film. Pourtant rien ne permettait de prévoir que celui-ci serait aussi triste tant sa qualité artistique est très en dessous des standards de son époque. Il faut dire que ce film fut conçu dans un esprit d'économie afin de renflouer les caisses de la compagnie. Si Blanche-Neige et les sept nains avait été un succès international incontournable, les films suivant (Pinocchio, Fantasia) ne parvinrent ainsi pas à se rentabiliser, et Walt Disney avait déjà mis en chantier Bambi. La fermeture du marché européen du fait de la guerre, ainsi que les grèves, imposèrent de revoir entièrement sa copie. Sacrifiant dès lors le principe de proposer des oeuvres d'excellence, Dumbo fut réalisé avec un budget plus raisonnable. Ce qui se ressent alors nettement sur l'aspect général du film.
Le scénario est inspiré d'un conte pour enfant écrit par Helen Aberson en 1939. Walt Disney en acquis les droits d'adaptation très rapidement, et le film vit le jour à peine deux ans plus tard. Bien qu'il s'agisse d'une adaptation de ce conte, il est intéressant de mettre en parallèle l'histoire de Dumbo avec celle du vilain petit canard. Les deux personnages sont en effet rejetés et humiliés par tous. La seule véritable différence résidant dans la présence de Madame Jumbo dont l'amour pour son fils est sincère et touchant. Mais la force première du film est de rendre Dumbo foncièrement attachant et de rejeter au contraire tous les autres personnages du film (Timothée excepté). Les éléphantes attirent inévitablement le mépris, car elles offrent une caricature réaliste des mégères hypocrites que l'on a la malchance de croiser un jour dans sa vie. Les humains n'attirent pas plus la sympathie du public mais plutôt par l'injustice qu'ils font subir à Dumbo et sa mère. Dans Dumbo tout le monde est injuste avec le héros, renforçant cette tristesse lancinante qui parcourt l'intégralité de l'histoire.
Cette sensation est renforcée par le mutisme de Dumbo, ce dernier ne prononce en effet pas le moindre mot tout au long du film. C'est d'ailleurs un cas unique dans tous les longs métrages de Walt Disney. On se pose alors des questions sur ce point : est-ce parce que ce dernier est trop jeune pour pouvoir s'exprimer ? Ou bien, au contraire, cette hostilité lui a ôté toute volonté de parler ? Pour autant, les animateurs réussissent à retranscrire ses émotions dans ses gestes et ses attitudes. Un véritable tour de force. Mais un événement va bousculer sa vie : sa rencontre avec Timothée. Timothée porte à lui-seul presque la totalité du film, c'est lui qui réconforte Dumbo, lui qui exprime ses sentiments par la parole, lui encore qui le sort de sa mélancolie. Timothée est ainsi l'étincelle dans le coeur de Dumbo, il représente à lui seul l'espoir. Il contrebalance dès lors tous les autres personnages par sa forte personnalité et sa détermination à faire triompher son nouvel ami.
Artistiquement, Dumbo se veut à la fois une expérience visuelle et auditive à l'image de Fantasia, une expérience narrative comme Blanche-Neige et les sept nains, mais aussi une expérience burlesque comme les courts métrages. Dumbo est en effet à la croisée de tous ces genres, ni long métrage, ni cartoon, ni compilation. La relative courte durée du film (à peine une heure, générique compris) et son animation simpliste, bien qu'élégante, ne permettent pas de trancher. Il faut dire que le film enchaine séquences réalistes et surréalistes. Lorsque Dumbo rend visite à sa mère, on est prit par l'émotion du moment de cette retrouvaille. Mais juste après démarre une séquence tout aussi ésotérique que culte. Intervenant dans un moment propice pour sortir le spectateur de l'empathie qu'il partage avec Dumbo, on assiste ainsi à un impressionnant défilé d'éléphants roses psychédéliques ! Une scène qui détone particulièrement avec le reste du film, et pose les bases de ce qu'on retrouvera par la suite dans Alice au pays des merveilles. Ce défilé d'éléphants surréaliste fera par ailleurs une incursion dans Les aventures de Winnie l'ourson dans une version légèrement révisée, mais reprenant le même principe de surréalisme.
En France, Dumbo a connu deux doublages différents. Le premier fut réalisé pour sa sortie en 1947, il fut ainsi exploité jusqu'à la fin des années 80 y compris en vidéo. On y entendait notamment Camille Guérini (dans le rôle de Timothée) qui a beaucoup contribué à de nombreux longs métrages Disney de cette période. Ce doublage est l'un des plus anciens qui a réussi à subsister jusqu'à nous et que j'ai pu écouter en intégralité. Le doublage d'origine de Blanche-Neige et les sept nains n'a en effet jamais refait surface à ce jour, et ceux de Pinocchio et de Bambi n'existent actuellement que sous la forme d'extraits rarissimes. Le problème principal de ce premier doublage de Dumbo vient de l'enregistrement des dialogues « par dessus » les musiques et les dialogues, ôtant dès lors une grande part d'émotion dans le déroulement de l'intrigue. C'est sans doute cette raison qui poussa Disney France à procéder à un redoublage. Certaines sources précisent que ce redoublage a été effectué en 1980 pour la ressortie en salle de ce film, pour autant, le doublage d'origine a continué à être distribué en vidéo jusqu'en 1986 au moins (la VHS du Québec en témoigne) et plusieurs personnes rapportent que les VHS françaises de la collection des « Trésors de Walt Disney » le contient également. Or, cette collection a subsistée jusqu'en 1990 ! N'ayant que peu d'éléments pour confirmer ou infirmer cette date de 1980, je peux toutefois affirmer que ce redoublage est disponible depuis la VHS parue en 1991 et n'a jamais été modifié depuis lors, aussi bien en France qu'au Québec. C'est celui-ci que tout le monde connaît actuellement, et il faut dire que la présence de Roger Carel contribue à la popularité inégalée du film.
Dumbo n'est toutefois pas exempté de défauts. Même si le film ne dure qu'une heure, il faut reconnaître qu'il est plutôt longuet. Si le film enchaine effectivement plusieurs moments artistiques réussis, le scénario n'évolue que très peu et il faut réellement attendre le derniers tiers du film (peu de temps après les éléphants roses) pour que tout se mette en place et s'enchaine rapidement. Dumbo est également au centre de quelques polémiques. La première est liée à l'alcool. Tout comme Pinocchio fut fustigé pour la même raison (et l'utilisation du tabac également), certaines personnes se sont indignées de voir Dumbo et Timothée ivres, alors que la boisson est largement diluée dans de l'eau et bue de façon totalement involontaire. La seconde polémique est elle née durant les années 60, et elle est actuellement remise au premier plan : la personnalité des corbeaux. Certains y voient en effet une caricature négative de la culture afro-américaine au même titre que Mélodie du sud, alors que d'autre démontrent au contraire l'aspect positif de ces personnages.
Mais au final qu'importe les polémiques, Dumbo a su traverser les générations de spectateurs et font de son héros l'un des plus connus du public. Bien qu'il soit un film à petit budget et qu'il soit foncièrement triste, il a su toucher le coeur de nombreux spectateurs. Tout le monde connaît aujourd'hui l'éléphant volant aux grandes oreilles ! Il faut dire aussi que le film a été l'un des premiers films à être paru en vidéo d'abord à la location puis à la vente, et qu'il est resté jusqu'en 2006 environ toujours disponible dans le commerce. De fait, tout comme Alice au pays des merveilles, ce film permet de retranscrire l'évolution de l'édition vidéo des films Disney pendant presque trois décennies, car il a été toujours réapprovisionné en magasin. Il faudra finalement attendre la nomination de John Lasseter à la tête du département animation pour que Dumbo vienne rejoindre la liste des films prestigieux bénéficiant de sorties vidéo de qualité mais aussi limitée dans le temps.
Olivier J.H. Kosinski - 17 février 2010
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1er Doublage (France - 1947)
Timothée : Camille Guérini
La cigogne : Maurice Nasil
Monsieur Loyal : Fernand Rauzena
Eléphante rose : Germaine Kerjean
Eléphante verte : Lita Recio
Jim Corbeau : Zappy Max
Corbeau bedonnant : Jo Charrier
Corbeau aux grosses lunettes : Roméo Carles
Autres corbeaux :
- Jo Charrier (Chant)
- Coco Aslan (Chant)
Clowns :
- Georges Hubert
- Roméo Carles
Voix-off Presse : Claude Péran
Divers : Daniel Gilbert
2e Doublage (France - 1980)
Narrateur : Claude Piéplu
Madame Jumbo : Hélène David (Dialogues)
Madame Jumbo : Claudine Meunier (Chant)
Timothée : Roger Carel
La Cigogne : Jacques Ferrière
Monsieur Loyal : Jacques Dynam
Eléphante rose : Paula Dehelly
Eléphante bleue : Jeanine Forney
Eléphante rouge : Béatrice Delfe
Eléphante verte : Danielle Volle
Jim Corbeau : Jacques Balutin (Dialogues)
Jim Corbeau : José Germain (Chant)
Corbeau à grosses lunettes : Serge Lhorca
Corbeau à petites lunettes : Michel Bedetti
Corbeau au chapeau percé  : Francis Lax
Corbeau bedonant : Pierre Garin
Clown 1 : Serge Lhorca
Clown 2 : Guy Piérauld
Clown 3 : Henry Djanik
Clown 4 : Michel Bedetti
Clown 5 : Georges Aubert
Jo le balayeur : Roger Lumont (Voix 1)
Jo le balayeur : Georges Atlas (Voix 2)
Un petit garçon : Jackie Berger
Un employé du cirque : Georges Atlas
Casey Junior : Francis Lax
Aboyeur 1 : Serge Lhorca
Aboyeur 2 : Roger Lumont
Aboyeur 3 : Georges Atlas
Solites « Le rêve des éléphants »:
- Jean Stout
- Jean-Claude Corbel
Choeurs « Le rêve des éléphants »:
- Danielle Licari
- Graziella Madrigal
- Claudine Meunier
- Michel Barouille
- Jean-Claude Corbel
- Jo Novès
- José Germain
- Jean Stout
- Jean-Claude Briodin
- Jean Cussac
Sources :
La Gazette du Doublage
Dans l'ombre des studios
Planète Jeunesse
Carton Générique