Malgré son titre qui ne le laisse pas supposer, La princesse des glaces est bien le troisième opus de la saga animée russe The Snow Queen dont le premier volet est paru en 2012. C'est cependant le premier à sortir en salle en France, le 14 février 2018. Le long métrage reprend cependant les mêmes comédiens français que les deux premiers. A ce jour, le long métrage est inédit au Québec.
Après avoir vaincu la Reine des neiges, Gerda parcourt le monde avec son frère Kai pour tenter de survivre en racontant leurs exploits. Mais Kai n'est pas en paix avec lui-même. Il rêve de revoir ses parents, enlevés autrefois par le Vent du Nord et de vivre de nouveau en famille. Alors qu'un désaccord se met entre Kai et sa soeur, Gerda décide de se lancer dans une nouvelle aventure en compagnie de Rollan, qu'elle vient à peine de rencontrer, afin de trouver la pierre aux souhaits. Dès lors, la légende liée à cette pierre de feu et de glace va chambouler sa vie et rien ne va se passer comme elle l'avait prévu...
Qui aurait cru qu'un film d'animation russe, a priori très mineur, puisse connaître un tel succès et se voir offrir plusieurs bonnes suites qui ne trahissent pas le matériel de base ? Quand La Reine des neiges - The Snow Queen est paru en 2012, tout le monde y a vu une manière à peine déguisée de se faire de l'argent sur le dos de la version Disney du conte de Hans Christian Andersen. En même temps, je suis persuadé que cette affirmation n'est pas tout à fait erronée. Il n'empêche, en proposant une relecture plutôt fidèle du conte duquel il s'inspirait, rien ne laissait supposer que ses personnages vivent plusieurs nouvelles aventures. D'autant plus quand, en 2014, The Snow Queen 2 - La Reine des neiges, le miroir sacré est paru, celui-ci semblait être plus proche du film dérivé recentré sur Orm qu'une véritable suite aux aventures de Gerda. Mais qu'importe, la plupart des personnages y faisaient leur retour dans une histoire qui se laissait regarder sans déplaisir. Profitant de leur popularité, et seulement quelques mois après le petit interlude Gris le (pas si) grand méchant loup, Wizart Animation décide finalement de remettre une troisième fois le couvert dans une histoire qui allait boucler la boucle entamée quatre ans plus tôt.
A ce petit jeu, le studio d'animation russe ne va plus cacher ses ambitions internationales, apportant une telle qualité technique à son troisième volet qu'il allait se voir offrir une sortie en salle dans certains pays d'Europe, notamment en France où, cependant, on lui retire sa filiation en lui donnant un titre complètement autonome, La Princesse des glaces, qui reste toutefois mal à propos. On cherchera en effet tout au long du film à savoir qui peut être cette princesse que le titre évoque, alors qu'il n'y en a aucune dans le récit, si ce n'est bien sûr la célèbre Reine des neiges qui fait ici de la figuration et dont le rang royal semble tellement rappeler celui d'une certaine Elsa que l'importateur a visiblement été totalement effrayé de le réutiliser pour titre. Bref, tout cela pour dire que La Princesse des glaces revient à ses fondamentaux, puisqu'il remet au coeur du récit son héroïne Gerda dans un récit fantastique qui n'a presque plus rien à voir avec ce qu'elle avait vécue jusqu'ici. Après une dispute avec son frère, elle se retrouve ainsi embrigadée dans une aventure improbable avec un drôle de nouveau comparse.
Une chose est certaine, la saga The Snow Queen n'a jamais fait dans la dentelle, adorant toujours faire dans la démesure pour de folles scènes impressionnantes techniquement parlant, mais qui n'apportent rien de particulier au récit si ce n'est de le rendre épique. Wizart Animation va ici encore plus loin dans la disproportion, souhaitant sans le moindre doute donner une véritable allure cinématographique à son long métrage. Il faut d'ailleurs voir avec quelle assurance le studio propose un visuel merveilleux, rehaussé cette fois par l'ingénieuse alternance de couleurs chaudes (la lave rouge) et froides (la glace bleu) pour offrir un environnement onirique. Paradoxalement, si La Princesse des glaces gagne effectivement en démesure et en scènes follement divertissantes, Wizart Animation exacerbe les défauts de ses deux illustres prédécesseurs. Pour autant de scènes homériques que compte l'aventure, il y a malheureusement tout autant de scènes infantiles qui cassent inexorablement la fougue du récit.
Là où Gris le (pas si) grand méchant loup arrivait à être constant dans son intégralité en choisissant d'aborder une aventure spécialement calibrée pour le jeune public, La Princesse des glaces essaye de rallier à lui le plus grand nombre de spectateurs de tous âges mais n'en trouve pas le parfait équilibre. En soit, ce n'est pas vraiment une régression de cette saga hivernale russe, c'était déjà le principal reproche que l'on pouvait faire à ses deux prédécesseurs. Ici, cela apparaît de manière plus flagrante car le contraste entre une scène comique très puérile et une scène spectaculaire digne de gros films d'action est d'autant plus grand qu'il ne l'était auparavant. Malgré tout, Wizart Animation retombe toujours sur ses pattes, car le long métrage compte des personnages vraiment charismatiques, fourmille d'idées tellement succulentes et offre des environnements si magnifiques que cela permet irrémédiablement de faire passer la pilule et lui pardonner ses errements.
En ce qui concerne la bande originale, Wizart Animation confirme son virage vers la culture anglo-saxonne amorcé quelques mois plus tôt avec Gris le (pas si) grand méchant loup, au détriment de la culture russe en incorporant au récit la chanson This Is The Life interprétée par Amy Macdonald qui est cette fois conservée telle quelle aussi bien dans la version originale russe que sur toutes les versions internationales (seul le générique de fin bénéficie de deux chansons distinctes, une russe et une autre en anglais). Cet ajout, insolite au premier abord pour un film d'animation russe, s'avère finalement très agréable. La chanson sert avant tout à établir une relation amoureuse entre Gerda et Rollan dans une séquence magique qui épouse de façon idéale tous les codes du genre, notamment ceux propres aux films d'animation Disney. Cette séquence est d'autant plus intéressante qu'elle contraste fortement avec le dernier acte de La Princesse des glaces qui va mettre à mal la relation entre les deux personnages.
Après deux opus vraiment amusant à regarder, La Princesse des glaces parvient avec un certain panache à clôturer dignement une intrigue amorcée en 2012. Surpassant de loin les trois précédentes réalisations de Wizart Animation, ce long métrage mérite pleinement sa consécration de s'être vu offrir une sortie en salle en France. Très bien réalisé, rocambolesque et drôle, La Princesse des glaces réussit à réinventer les personnages sans les dénaturer. On regrettera juste ce flottement qui existe entre les scènes infantiles et plus matures. Si elles avaient été mieux équilibrées, le long métrage aurait vraiment gagné une toute autre dimension qui l'aurait transformé en une grande aventure animée. Mais cela ne semble pas avoir refroidi les ardeurs de Wizart Animation qui a finalement décidé de réaliser un quatrième opus dont la parution est prévue en décembre 2018 en Russie. Le studio sera-t-il capable de faire aussi bien ? On verra bien mais, rappelons-nous, il ne faut pas trop abuser des bonnes choses.
Olivier J.H. Kosinski - 16 novembre 2018
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Doublage (France - 2018)
Gerda : Isabelle Volpé
Kai : Jean Adrien Espiasse
Rollan : François Créton
Orm : Patrick Noérie
Alfida (Fille Pirate) : Gabrielle Jéru
Arrog : Jochen Hägele
Maribel : Suzanne Sindberg
Shaman : Olivier Angele
Grandma : Catherine Cerda
Rahat : Eric Marchal
Locum : Jean Marco Montalto
Hippie : Jacques Albaret
Femme Pirate : Suzanne Sindbgerd
Petits trolls : Suzanne Sindbgerd
La Reine des neiges : Claudine Gremy 1
Professeurs : Lucille Boudonnat
Enfants : Lucille Boudonnat
Sources :
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