Analyse de l'oeuvre
Et nous y revoici, dans l'inévitable suite d'un film ayant littéralement fracassé le box office pour des raisons que je ne m'explique pas vraiment. Avouez que les Chipmunks ont cette curieuse faculté de nous détruire les tympans dès qu'ils ouvrent la bouche. Comment ça, non ? Ah, c'est peut-être juste moi qui n'arrive pas à supporter leurs voix, vu que 20th Century Fox s'est senti obligé de lancer immédiatement après la première cacophonie la conception d'une suite. Vite, trop vite sans doute, car le long métrage va souffrir de nombreuses tares qui font de Alvin et les Chipmunks 2 un film très largement en dessous de son aîné, déjà perfectible. A l'exception de quelques menus changements, le scénario n'est qu'une affreuse redite, en mettant en scène des protagonistes à peine différents. Pire, le long métrage propose des enjeux qui sont, dans les grandes lignes, exactement les mêmes qu'auparavant. Grosso modo, l'expression "on reprend les mêmes et on recommence" pourrait parfaitement qualifier ce Alvin et les Chipmunks 2. Les seules réelles nouveautés concernent l'arrivée tonitruante des Chipettes, nées en 1983 pour les besoins de la série d'animation et imaginées par Janice Karman, la belle-fille de Ross Sr Bagdasarian, à la suite d'un premier duo musical masculin/féminin de Chipmunks sur le titre "You're The One That I Want" tiré du film Grease. Pour le reste, Alvin et les Chipmunks 2 fait, peu ou prou, la même chose, sans chercher une seule fois à innover.
Si vous avez lu mon analyse de Garfield 2, je faisais un constat assez amusant sur la propension des américains à toujours réaliser un premier long métrage dont l'intrigue se déroule sur le territoire américain puis, presque systématiquement, le second doit se dérouler soit à Paris, soit à Londres. Sans réelles surprises, Alvin et les Chipmunks 2 commence donc son intrigue à Paris ! Mais le long métrage innove sur un point particulier, seul Dave va y rester sur une grande partie du film, coincé dans un hôpital à la suite d'un accident de scène provoqué par Alvin. Une belle pirouette pour écarter Dave de l'intrigue, dont visiblement les scénaristes n'ont absolument pas su quoi faire d'autre de lui, pour le remplacer par son sosie spirituel : Toby Seville. Toby, c'est typiquement le gars qui débarque dans une intrigue à la suite d'un artifice scénaristique tellement gros qu'on en lève les yeux au ciel. Zachary Levi, qui joue le rôle, se démène comme il peut pour jouer un adulescent flemmard, gaffeur, sans aucune ressource financière, sans considération pour les autres, mais qui a finalement un bon fond, même s'il semble surtout vivre au crochet de Tante Jackie. A cela s'ajoute l'inévitable looser qui ne s'est jamais remis de son chagrin d'amour de lycéen, mais qui fait tout pour la pécho maintenant qu'elle est adulte. C'est d'une mièvrerie même pas digne d'un épisode de Les feux de l'amour.
Pendant ce temps, Alvin, Simon et Théodore doivent écourter leur tonitruante tournée mondiale pour revenir à Hollywood où ils sont contraints d'aller à l'école. Si l'on veut bien écarter l'absurdité de la chose (des tamias doivent aller à l'école ?) qui reste avant toute chose un clin d'oeil appuyé à la série animée, Alvin et les Chipmunks 2 enchaîne sans une once d'imagination tous les plus grands poncifs et clichés autour des collèges et lycées américains. On se retrouve inévitablement devant le grand caïd footballer écervelé et ses deux acolytes qui jurent de saper la célébrité des Chipmunks. Alvin se dit qu'il faut jouer les fortes têtes afin de s'imposer, et finit naturellement par les rejoindre. C'est tellement absurde qu'on s'attend en frémissant, au détour de chaque scène, à voir les joueurs s'affronter sur le terrain en poussant la chansonnette. Ce qui n'arrive heureusement pas. Pendant ce temps, Alvin et les Chipmunks 2 aborde l'inévitable séparation de la fratrie, sa lourde conséquence sur Simon et Théodore, mais qui s'avère tout aussi factice et immensément prévisible. De leur côté, les Chipettes se voient embrigadées par Ian Hawke qui tente de réitérer avec elles ce qu'il n'était pas parvenu à faire avec les Chipmunks deux ans plus tôt. Au final, les trois intrigues vont se rejoindre dans un grand final qui ressemble, comme deux gouttes d'eau, à celui du premier film. C'est d'un palpitant, je ne vous raconte pas. Je crois que Alvin et les Chipmunks 2 est juste un remake déguisé du premier film qui ne veut tout simplement pas l'avouer.
Au final, on se retrouve avec Alvin et les Chipmunks 2 devant quelque chose de similaire avec le premier film : même contexte, même conception, même principe, même intégration du numérique dans le monde réel (sauf que, cette fois, il y a 6 tamias), même unité de temps, même intrigue, même antagoniste, même chansons horripilantes. Il n'y a que quelques personnages qui changent, mais vraiment à la marge, puisqu'on aurait tout à fait pu retrouver Dave et Claire, à la place de Toby et Julie, ce qui n'aurait strictement rien changé au scénario. Ça se laisse voir, mais ça reste tout de même bien moins pertinent que le premier film. Alvin et les Chipmunks 2, ça ressemble juste à du radotage.
Olivier J.H. Kosinski - 16 septembre 2023
