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Studio Ghibli
Le voyage de Chihiro

Le voyage de Chihiro sort en France le 10 avril 2002. Comme partout ailleurs dans le monde, il fait un triomphe en salle pour un film d'animation japonais et reçoit une pluie de récompenses en Europe. C'est sans nul doute possible grâce à ce film que le studio Ghibli a réellement percé et s'est fait connaître du grand public en France. Galvanisé par ce succès sans précédent d'un long métrage japonais en salle, Disney France a dès lors concocté une sortie majeure à pratiquement tous les films du studio Ghibli. A commencer par leur tout premier, Le château dans le ciel, 17 ans après sa sortie initiale japonaise.

L'intrigue

Chihiro, une fillette de 10 ans, est en route vers sa nouvelle demeure en compagnie de ses parents. Au cours du voyage, la famille fait une halte dans un parc à thème qui leur paraît délabré. Lors de la visite, les parents s'arrêtent dans un des bâtiments pour déguster quelques mets très appétissants, apparus comme par enchantement. Hélas cette nourriture les transforme en porcs... Prise de panique, Chihiro s'enfuit et se retrouve seule dans cet univers fantasmagorique ; elle rencontre alors l'énigmatique Haku, son seul allié dans cette terrible épreuve...

Analyse de l'oeuvre

Plus que tout autre film du studio Ghibli, bien au dessus de Princesse Mononoké déjà franchement tarasbiscoté dans son genre, Le voyage de Chihiro est pour moi le film d'animation le plus bizarre et le plus compliqué jamais conçu par Hayao Miyazaki. Je ne comprends d'ailleurs pas comment un tel film a pu connaître un tel triomphe unanime, alors qu'il s'agit de son oeuvre la plus exigeante jamais réalisée. N'ayant pas peur de le dire, c'est à ce jour le film le plus complexe jamais sortie de l'écurie Ghibli ! D'ailleurs, c'est aussi le film qui renferme le plus de références au folklore japonais, mais dont les propos semblent curieusement si familier pour le spectateur occidental. Sorte de Alice au pays des bizarreries, Le voyage de Chihiro se veut plus profond dans la forme et dans le fond que l'oeuvre de Lewis Caroll. Là où ce dernier aurait prôné le non sens d'un événement, Hayao Miyazaki accorde une importance à toute chose dans son récit. Là où Alice ne faisait que rêver, on est persuadé que Chihiro vit réellement cette étrange aventure. De fait, l'analyse de ce film est difficile à aborder, car on peut trouver de nombreuses portes dérobées par lesquelles entrer.

Le voyage de Chihiro est par exemple proche de la satire. Bien que le film s'ouvre dans notre monde réel et semble ensuite nous projeter dans un autre monde, tout ou presque évoque pourtant notre propre réalité. Des parents sans gênes qui s'installent à leur aise sans chercher à comprendre, aux désastres causés par l'appât du gain, en passant par une discrimination par rapport à sa place sociale, la critique est tout aussi acerbe que réaliste. Chihiro n'est d'ailleurs pas épargnée non plus, même si elle semble dissonante par rapport à tout ce qui l'entoure. Au début du film, elle est avant tout une enfant bornée et boudeuse car elle refuse le changement imposé par ses parents dans cette nouvelle vie qui s'annonce. Confrontée malgré elle à des évènements incompréhensibles qui la dépassent, elle doit faire preuve de maturité pour réussir à survivre dans ce monde hostile. Le voyage de Chihiro est donc aussi une évocation du passage à l'âge adulte.

Le voyage de Chihiro est ensuite un film nimbé de métaphores et d'allégories, alors qu'il semble au premier abord être simple et facile d'accès. Le récit de base du film se voudrait accessible par tous, mais le second niveau de lecture impose une discipline intellectuelle assez intense. C'est d'ailleurs la principale raison qui m'interdit de glorifier ce film, car à chaque visionnage, chacune de mes certitudes s'envole par un nouvel élément que je n'avais pas distingué jusque là. De fait, je suis quasiment incapable de regarder Le voyage de Chihiro sans passer mon temps à chercher des explications à tout. Or, Hayao Miyazaki a tellement bien alambiqué son oeuvre que des dizaines d'interprétations cohérentes peuvent être appliquées à toute chose. Quand je disais que c'était une oeuvre exigeante, je ne vous mentais pas. Ce fort symbolisme se retrouve également du côté des décors. Voir ce train traverser cet océan désertique nous conforte dans ce sentiment que rien ne peut être deviné à l'avance mais pourtant que rien n'arrive par hasard.

Hayao Miyazaki nous plonge également dans une sorte de long métrage d'animation évoquant l'art grotesque, avec ces figures étranges, incohérentes, effrayantes et disproportionnées. Même Chihiro, plus naturelle que la majorité des personnages qui l'entourent, n'est pas foncièrement plus réaliste que les autres. Dans Le voyage de Chihiro, on côtoie des personnages fantasques à la personnalité affirmée. Complexe dans leurs formes mais aussi dans les buts qu'ils poursuivent, ces personnages dérangent plus qu'ils n'attirent la sympathie. Pourtant, Hayao Miyazaki nous démontre régulièrement que les apparences sont souvent trompeuses. Petit à petit, on comprend soudain que Le voyage de Chihiro est une métaphore de la vie. Chacun d'entre nous a déjà expérimenté cette incertitude face à l'inconnu.

Au delà de la complexité des personnages de Le voyage de Chihiro, un autre point fait souvent l'unanimité : sa bande originale. Elle est pourtant elle aussi terriblement embrouillée et merveilleuse à la fois. Nombre de ses musiques partagent des sonorités proches de la mélancolie et de l'espoir, mais aussi l'angoisse et le merveilleux. Cela ne se remarque pas vraiment pendant la projection du film, car on est happé par ce qui se passe à l'écran, mais cette dualité musicale est très frappante lorsque l'on décide d'écouter la bande originale séparément. Certains sons donnent réellement le frisson, alors que d'autres vous enchantent. Des instruments habituellement chaleureux, sont détournés vers leur aspect plus noirs, à l'image du piano renforcé par des chorales angoissantes. Le plus étonnant restant que certaines pistes sont capables d'évoquer les deux sentiments à la fois. Parmi elles, on relèvera aussi des ballades entraînantes judicieusement placées dans le film, apportant un peu de gaieté dans ce monde bizarre. Bref, intriguant et magnifique à la fois !

Tandis que tout le cinéma américain subissait une mutation profonde vers le passage au tout 3D, Le voyage de Chihiro est un éloquent pied de nez démontrant la supériorité intrinsèque de la 2D dans la richesse visuelle d'un film d'animation. Là où un film comme Toy story a prit un sacré coup de vieux dans l'aile en à peine deux décennies, le superbe enrobage du film de Ghibli est prêt à affronter les décennies sans perdre la moindre plume. En dehors des goûts du public qui pourront forcément changer dans l'avenir, Le voyage de Chihiro est paré de toute attaque contre son aspect technique. Que ce soit au niveau des personnages ou des décors, tout fourmille de détails souvent minuscules renforçant le réalisme général du film. Bien qu'il ai également recours à quelques plans de pure 3D, cette technique n'est là que pour renforcer le merveilleux et compléter la magnificence de la 2D. La technique au service de l'histoire en somme, sans fioriture ni surenchère.

Unanimement salué et récompensé des plus grandes distinctions à sa sortie en salle, le film bénéficie même d'un doublage français de grande qualité, digne de ce qu'on attend généralement des films produits par Disney France. Simple et complexe, drôle et effrayant, débordant de joie et de tristesse, c'est un film fascinant qui permet mille et une interprétations possibles afin de s'accomoder de la sensibilité de chacun de ses spectateurs. Apothéose de la carrière de Hayao Miyazaki, Le voyage de Chihiro est et restera sans doute toujours le plus grand chef d'oeuvre du studio Ghibli.

Olivier J.H. Kosinski - 28 février 2014

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Voxographie Francophone

Doublage (France - 2001)

Chihiro : Floriane Orphelin

Hakû : Donald Reignoux

Yubâba : Anne Ludovik

Kamaji : Jean-Claude Sachot

Lin : Véronique Volta

La mère de Chihiro : Laurence Bréheret

Le père de Chihiro : Jean-François Aupied

Aokeru : Gilbert Levy

La grenouille : Gilbert Levy

Le bébé : Gabrielle Bonavera

Sources :
Forum Doublage France

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